Homélie du Dimanche de la Sainte Trinité
Dt 4,32-34.39-40 ; Ps 32 ; Rm 8,14-17 ; Mt 28,16-20
Comment mettrions-nous en musique le mystère de la Trinité ?
Supposons quelques instants que nous soyons de grands compositeurs de musique baroque. En cette fête de la Sainte Trinité, comment mettrions-nous en musique le mystère de la Trinité ? La musique de cette époque, et pas uniquement la musique sacrée, fait largement usage du figuralisme. Il est possible d’entendre une évocation de la Trinité dans les doxologies des psaumes. Plusieurs compositeurs ont cherché à rendre la singularité et l’unité des personnes de la Trinité, grâce à la polyphonie des chœurs.
Le Dixit Dominus de Haendel, est la mise en musique du psaume 109, souvent présent aux vêpres du dimanche et des fêtes. Dans la doxologie, après avoir fait entendre chacun des noms successivement, il fait par exemple, débuter le nom du Fils par un pupitre alors qu’un autre pupitre termine de chanter le nom du Père. Plus loin, nous entendons, dans l’harmonie des pupitres, l’évocation du Saint Esprit ensemble avec celle du Père et du Fils. Ils sont présents en même temps mais ne se confondent pas. Et la beauté de l’un enrichit celle de l’autre. Nous pourrions les écouter mais, il faudrait compter trois minutes pour la Trinité et trois minutes pour l’éternité. N’hésitez pas à le faire « Gloria Patri Dixit Dominus » : https://www.qwant.com/?q=gloria+patri+hanedel&t=web
Dans ces mises en musique, la Trinité n’est pas refermée et si quelque chose semble tourner en rond à la première écoute du Gloria Patri de Haendel, tant dans la mélodie que dans le rythme ou les nuances, c’est l’évocation des siècles des siècles. Or dans notre page d’évangile, la mention de trinitaire est faite en vue d’une ouverture, en vue de baptiser de nouveaux chrétiens.
Une Trinité ouverte…
Après cet intermède musical, regardons, à l’aide de nos lectures, à quel point le mystère de la Trinité nous concerne. L’évangile rapporte l'appel de Dieu le Fils à baptiser au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit toutes les nations, à les accompagner dans une foi trinitaire. Au-delà d’une relation entre Dieu et moi, le choix de ce passage pour fêter la Trinité nous tourne vers notre rôle de chrétiens dans la relation entre Dieu et les nations.
Ressembler à la Trinité
Le Seigneur poursuit en invitant à apprendre aux nations à observer ce qu’il a commandé. Moise aussi dans la première lecture, après avoir souligné qu’en se choisissant un peuple, Dieu ne referme pas sur lui-même, Moise appelle à garder les décrets et commandements. Mais ces décrets et commandements ne sont-ils pas une formalisation avec des mots humains du type de relations qui se vit dans la Trinité ? Ne nous font-ils pas entendre une invitation, un appel, un défi olympique, une espérance, de vivre entre nous une qualité de relation toujours plus semblable à celles qui se vivent dans la Trinité ? N’est-ce pas cela qui pourra donner aux nations le désir, la soif, d'entrer dans le mystère trinitaire ? Une vie selon ces commandements devient, de fait, missionnaire.
Vivre de la Trinité
La seconde lecture nous montre encore une autre facette de l’ouverture au sein de la Trinité. L’Esprit, dont Saint Paul dit, dans un passage parallèle, qu’il est l’Esprit du Fils, n’attire pas l’attention à lui, il la tourne vers le Père en criant « Abba ! » (Galates 4, 6). Mais Saint Paul confirme, avec une autre approche, que la contemplation de la vie trinitaire doit transformer la qualité de nos relations à nous. Peut-être que la pratique d’une vie chrétienne sera cause de souffrance mais une souffrance vécue avec le Christ, une souffrance qui permet de ressembler à la Trinité et qui ouvre pour tous l’espérance de la gloire.
Roublev : invités à communier au mystère trinitaire
Après avoir débuté en musique, concluons avec une icône. Vous avez la chance d’avoir, en haut de la feuille, un croquis de la Trinité de Roublev. Les trois personnes sont disposées autour d’une table de manière que leurs regards circulent de l’une à l’autre. Devant la table, un rectangle attire notre attention.
Il suggère notre place à nous qui sommes invités gracieusement, aujourd’hui encore au festin des noces de l’Agneau. Nous voici conviés à expérimenter très concrètement que la Trinité n'est pas refermée sur elle-même, qu’elle invite largement et appeler à en témoigner ensuite par la qualité de nos relations entre nous et avec les nations.